Le livre que Laurent Dingli vient de faire paraître pour éclairer le dossier de la vie et de la mort de Louis Renault est l’illustration du travail de vérité auquel le Premier Ministre vient d’appeler les Français. L’intérêt premier de cet ouvrage est sa méthode rigoureuse d’investigation sur un destin rare. Louis Renault ne mérite pas de complaisance. Son génie, son action d’entrepreneur l’ont toujours situé au-dessus des analyses mesquines et des mensonges.
L’auteur décrit la vie d’un homme qui ne méritait pas de devenir un tabou et qu’un excès d’indulgence eut choqué. Au fil des pages, on découvre un inconnu dont le nom est parmi les plus célèbres de notre siècle expirant, car Louis Renault est “du” siècle (23 ans en 1900). Créateur de tout ce qui est mécanique, moteurs d’avions, d’automobiles, de motrices, créateur de tout véhicule requis pour la France en guerre en 1914.
Créateur d’un système de production inspiré du taylorisme, Ford est son idole. Créateur de rapports sociaux dans l’entreprise. Tout n’est pas admirable dans ses créations, dont certaines ont suscité des oppositions. Laurent Dingli excelle a souligner avec probité les défauts autant que les interprétations douteuses des actions, en particulier celles parfois ambiguës de la période 1940-1944. Celles qui collent à l’image du créateur de Billancourt qui ne pouvait gérer seul et sans casse une tourmente qu’il ne maîtrisait pas. Le livre se lit comme un roman, dosage savant des résultats d’une démarche scientifique et de “fatum”.
Il y a du dossier d’avocat étayé, du Simenon et du Shakespeare dans le livre. Ne soyez pas dérouté par la dimension de ‘ouvrage, un grand homme, même discuté, justifiait un ouvrage qui serait aussi grand et peut-être discuté. Ce livre, sérieux et honnête, est celui de la passion, celle de Renault pour la création, celle de Dingli pour le destin de son sujet, et celle que laisse deviner les premières pages de l’introduction.