Interview
Renault Collabo ?
Dans sa remarquable et très complète biographie de Louis Renault, Laurent Dingli évoque les circonstances tragiques de sa disparition et le sort fait à son entreprise.
La fin de Louis Renault demeure largement mystérieuse…
Le 23 septembre 1944, quand il est arrêté et conduit à l’infirmerie de la prison de Fresnes, il a 67 ans, est aphasique, souffre d’urémie et des séquelles d’une dépression nerveuse. Le 27 septembre, les médecins qui l’examinent concluent que « son état est incompatible avec le maintien en détention ». Chaque nuit, il est maltraité par ses gardiens. Son état général empire – il est peu et mal soigné – et les mauvais traitements font le reste : il meurt le 24 octobre 1944. Sans avoir été jugé.
Ce que l’on reprochait à Renault, c’est d’avoir travaillé pour les Allemands entre 1940 et 1944 ?
Durant la seule année 1939, les usines Renault ont livré 65 000 véhicules à l’armée française. Ces usines en ont fabriqué 34 000 destinés aux Allemands… en quatre ans d’Occupation !
Qui pouvait souhaiter la disparition physique de Louis Renault et tirer profit de la confiscation de l’entreprise ?
A peu près tout le monde : les communistes et la CGT, qui mettaient la main sur Billancourt ; les gaullistes, qui dotaient le pays d’un puissant outil industriel à bon prix puisqu’il n’y avait qu’un seul actionnaire ; et plusieurs ministres du gouvernement provisoire qui avaient des raisons personnelles d’en vouloir à Louis Renault – avant guerre, il en avait licencié certains pour incompétence…